Suite à la lecture des résultats d’une étude sur l’enseignement des enjeux climatiques à l’école (https://orfee.hepl.ch/handle/20.500.12162/2510), il nous a semblé judicieux de revenir sur un point : comment expliquer le réchauffement climatique, les gaz à effet de serre, etc. de manière simple, mais correcte d’un point de vue scientifique dans nos animations.
Pourquoi le fait de consommer de l’énergie a une influence sur le réchauffement climatique ?
Le problème dans ce cas vient principalement de l’utilisation des sources d’énergie fossiles. Lorsqu’on utilise du pétrole, du gaz naturel ou du charbon, des gaz sont émis, parmi lesquels certains sont appelés « gaz à effet de serre » (GES). Il s’agit notamment du CO2 (dioxyde de carbone, lors de la combustion), mais aussi du CH4 (méthane, lors de l’extraction, du transport, du raffinage, de combustion incomplète).
Les gaz à effet de serre ont la propriété de laisser les rayons solaires arriver jusqu’à la surface de la Terre, mais d’absorber la quasi-totalité du rayonnement infrarouge (thermique) provenant de la Terre. Ceci veut dire que s’il n’y avait pas du tout de gaz à effet de serre dans notre atmosphère, la Terre émettrait vers l’espace autant de rayonnement infrarouge que ce qu’elle reçoit du soleil. La température moyenne sur notre planète serait aux alentours de -18°C.
La Terre reçoit du rayonnement solaire, la surface se réchauffe, ce qui lui fait émettre un rayonnement infrarouge. La température s’équilibre à ~-18°C.
Les gaz à effet de serre présents naturellement dans l’atmosphère absorbent le rayonnement infrarouge émis par la Terre et en réémettent une partie vers la surface de la Terre et l’autre vers l’espace. La température moyenne de surface est alors aux alentours de 15°C.
Explication simplifiée de l’effet de serre naturel.
Le problème vient donc d’une surconcentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, due principalement aux activités humaines. Le forçage radiatif est donc augmenté, ce qui fait augmenter de quelques degrés la température moyenne à la surface de la Terre.
Augmentation du forçage radiatif avec les émissions de gaz à effet de serre issus de l’activité humaine.
Autre explication intéressante :
Remarque 1 : parmi les produits de combustion des énergies fossiles, on retrouve également d’autres polluants comme les particules fines (provoquant des problèmes respiratoires), le souffre et l’oxyde de souffre (responsables des pluies acides), ou encore les cendres contenant des métaux lourds, sans parler de contamination des milieux directement par écoulement d’hydrocarbures.
Remarque 2 : Nous avons parlé ici uniquement de conséquence directe d’utilisation d’énergies fossiles, mais ces émissions de gaz à effet de serre proviennent également de la production, du transport, de l’élimination des biens de consommations du quotidien.
Controverse de la serre
Le terme « effet de serre » a commencé à être utilisé dans les années 80, lors de la vulgarisation d’un bon nombre de rapports alarmants sur le réchauffement climatique.
En effet, l’analogie à une serre permet de bien imager le phénomène, surtout que les vitres sont également transparentes à la lumière visible, mais absorbent le rayonnement infrarouge. Par contre, elle n’explique qu’une partie du phénomène de « forçage radiatif », terme privilégié par les climatologues. Cette analogie est en effet problématique pour 2 points :
- Une vitre ne permet pas la circulation d’air entre l’intérieur et l’extérieur, contrairement aux gaz à effet de serre dans l’atmosphère (une partie de l’augmentation de température dans une serre vient du fait que simplement l’air ne peut pas circuler de l’intérieur vers l’extérieur)[1].
- Une vitre est une couche uniforme, qui ne varie pas en température dans son épaisseur (ou du moins de manière négligeable), contrairement à la couche d’atmosphère. En effet, pour expliquer l’augmentation du réchauffement plus la concentration en GES est grande, il faut tenir compte du fait que la température de l’atmosphère varie fortement selon l’altitude (et comme le rayonnement infrarouge est fonction de la température, cela a de l’importance suivant l’altitude d’absorption et de réémission).
Explication de la controverse : https://planet-terre.ens-lyon.fr/article/explication-effet-de-serre.xml
Explication très poussée mais intéressante dans une conférence de Jean-Louis Dufresne (Dir. de recherche au CNRS, ingénieur et climatologue) :
http://physique-chimie.ac-dijon.fr/IMG/mp4/effet_serre.mp4
Expliquer l’effet de serre dans nos animations
En résumé, l’analogie avec une serre est appropriée pour la partie transparence au rayonnement lumineux (lumière visible) et opacité aux infrarouges. Ensuite, tout dépend du niveau de complexité que l’on veut atteindre. Mais pour être exact en termes physiques, il faudrait dire que « c’est une représentation simplifiée » et que « dans la réalité c’est encore + compliqué que cela ».
Attention au vocabulaire : On a souvent tendance à dire que la vitre (ou serre) réfléchit les rayons infrarouges (IR) émis par la surface de la Terre. Or, elle (ainsi que les gaz à effet de serre) les absorbe, puis en réémet une partie en direction de la surface et une autre partie en direction de l’atmosphère.
Selon nous, pour des élèves au niveau école obligatoire, à part éventuellement en option math-physique ou dans un cours de physique de plusieurs heures dédié à ce thème, aller plus loin dans l’explication scientifique au niveau de nos animations est trop complexe. Il faudrait entrer dans des détails, notamment des longueurs d’onde de rayonnement, etc. Par contre, on peut insister sur quelques points :
- L’atmosphère, contrairement à la vitre, n’est pas étanche. Elle permet donc des échanges d’air.
- L’atmosphère est plus épaisse qu’une simple vitre.
- Les gaz à effet de serre n’agissent pas comme un miroir sur le rayonnement IR, ils l’absorbent, puis le réémettent vers le bas et vers le haut.
Explication intéressante avec ces différents niveaux de complexité :
https://jancovici.com/changement-climatique/aspects-physiques/quest-ce-que-leffet-de-serre/
Quelques remarques – des sujets qui interviennent souvent dans les animations sur ce thème
« Le réchauffement climatique c’est à cause du trou dans la couche d’ozone. »
Les deux phénomènes sont dus à l’activité humaine mais sont bien distincts. La fameuse « couche d’ozone » se trouve dans la haute atmosphère (on parle d’ozone stratosphérique) et elle nous protège des rayons UV solaires. Elle se fait détruire par moments et par endroits, principalement par les CFC (chlorofluorocarbones, issus de l’activité humaine (réfrigérants, et propulseurs d’aérosols) mais interdits dans les pays industrialisés depuis la fin des années 80). Moins cette couche nous protège, plus les rayons UV peuvent atteindre la surface et présenter des dangers pour la santé (peau, cancers).
L’augmentation des émissions de gaz à effet de serre n’a donc pas d’effet direct sur l’augmentation du trou dans la couche d’ozone.
« Pourquoi on ne parle que du CO2, alors que ce n’est pas le seul gaz à effet de serre ? »
Les principaux gaz à effet de serre sont la vapeur d’eau, le CO2, le CH4, le N2O, les halocarbures lourds, l’O3 (hé oui, l’ozone présent dans la basse atmosphère (ozone troposphérique) est également un gaz à effet de serre). Si la vapeur d’eau est celui qui est le plus grand responsable de l’effet de serre total, son origine est majoritairement naturelle. Or le CO2 est le principal, en quantité, produit par l’activité humaine. C’est pour cela que c’est celui dont on parle le +, qui est même pris comme base pour les unités de mesure des GES (équivalent CO2).
« Quelles sont les conséquences du réchauffement climatique en Suisse ? »
Il est vrai que l’on parle beaucoup de conséquences au niveau planétaire (fonte des calottes glaciaires, augmentation du niveau des océans, augmentation de la fréquence et de l’intensité des ouragans et autres événements météo extrêmes), mais il est intéressant de comprendre ce qu’il se passe en Suisse. La figure ci-dessous recense ce qui a été observé depuis 1864 en Suisse.
Changements significatifs du climat suisse, basés sur des données d’observations. [source : www.meteosuisse.ch]
Ces éléments ont pour corollaires également : problèmes d’îlots de chaleur, principalement en milieu urbain, disparition d’espèces endémiques, migration d’espèces plus « tropicales » vers la Suisse, augmentation de l’instabilité du terrain en zones de pergélisol, augmentation de la fréquence et de l’intensité des épisodes climatiques extrêmes, etc.
Remerciements à Martin pour ses relectures et ses images.